Slumdog Millionaire, inspiré du roman de Vikas Swarup, a ratissé large lors de la cérémonie des Oscars, aux États-Unis. Les professionnels locaux du cinéma l'ont apprécié.
Les critiques négatives pleuvent néanmoins.
L'intrigue est irréaliste : deux amoureux purs se retrouvant par deux fois après des années de séparation, se retrouvant sur des hasards inouis (croiser un ancien compagnon d'infortune aveugle, appeler au hasard une liste d'homonymes de son frère, etc.). Et alors ? On peut rêver romantique, non ? Ça change du monde réel.
L'Inde est représentée comme un enfer pour ses enfants et les habitants des bidonvilles. C'est pourtant vrai : les employés obligés de vivre dans ces quartiers spontanés faute de pouvoir louer ailleurs, des enfants utilisés par les bandits, l'affrontement nationaliste qui prétend se fonder sur les religions, les interrogatoires par la police,... La lecture de quelques critiques d'ouvrages sur l'Inde dans le numéro de Books confirme que tout n'est pas rose en Inde (comme partout ailleurs). L'Inde de Jamal Malik autant l'Inde que l'Inde qui réussit économiquement, que l'Inde montrée par la partie romantique et chantante de Bollywood. Pourquoi montrer les deux autres et pas celle-là ?
L'Inde ne peut pas être montrée comme ça par un étranger. J'apprécierai un film sur la France des années 2000 écrit et réalisé par un étranger, surtout s'il est originaire d'une des anciennes colonies françaises dont ses concitoyens rêvent de l'eldorado français. Qu'il ou elle rappelle nos défauts que nous ne voyons plus. Et qu'elle remporte un Oscar pour le faire savoir au monde entier. Ça nous secouerait. Comme cet affront peut secouer certains Indiens et les inciter à se mobiliser sur de vieux problèmes.
Une partie de l'Inde est-elle vexée qu'un Britannique soit capable d'utiliser les recettes bollywoodiennes (musique, danse, irréalisme des situations, opposition des classes) pour réussir plus facilement qu'un film de Bollywood sur la scène internationale ? Pourtant, les films musicaux de Bombay sont connus par les familles d'origine immigrée en France. C'est un succès plus discret... mais encourageant sur l'ouverture culturelle de mes concitoyens.
Bonne soirée hier, donc.